Vendredi dernier, on parlait de show don’t tell et plus précisément d’immersion. L’immersion est vitale car c’est l’une des clefs pour accrocher le lecteur. Même si c’est difficile, il faut éviter les mises à distance avec le protagoniste principal, par exemple les verbes tels que « ressentir, voir, entendre, réaliser, comprendre… ».
À mon sens, un auteur ne devrait pas écrire du tell en point de vue externe du style :
Le champ de bataille était effrayant. Gore le barbare entendait les flèches siffler autour de lui. Le guerrier s’adressa à ses compagnons et leur ordonna de fuir.

« Le champ de bataille était effrayant »
Dans cet exemple, on suit le destin du personnage de manière détachée : Gore entend des flèches « siffler autour de lui », mais on n’a pas l’impression d’être de son point de vue. Je pense qu’on devrait plutôt opter pour :
Les cris des mourants avaient de quoi rendre fou, sans parler de cette foutue odeur de cadavre. Gore se retourna vers ses compagnons recouverts de boue. Les flèches sifflaient de tous les côtés.
– Foutez le camp !

« Le champ de bataille était effrayant »
Dans la seconde proposition, écrite en point de vue interne, on ne précise pas que Gore « entend », « s’adresse » ou « ordonne », les odeurs, les pensées, les émotions et les sons s’imposent d’eux-même. Son injonction (« il leur ordonna de fuir ») se transforme en une ligne de dialogue (« foutez le camp ! »). Une remarque grossière, mais crédible dans la bouche d’un barbare. Puisqu’on parle de dialogue, il faut éviter autant que faire se peut ce que j’appelle la dialoguite. Voici un exemple écrit avec les pieds :
Gore le barbare se retourna vers ses compagnons.
– Les gars, je vous résume le plan : on franchit cette porte, on trouve Flamor le dragon. Et là, on le bute.
– Flamor ? répéta le nain végétarien. Tu parles de la créature qui a brûlé en une nuit le village de Bois-Lointain à l’époque de la Seconde Guerre des Cœurs Sombres ?
– Heureusement que le mage Artefax nous a donné les épées divines tueuses de dragon, s’exclama l’elfe culturiste.
– J’espère qu’elles fonctionneront, bougonna le nain. Je n’ose imaginer ce qu’il adviendrait du royaume si nous venions à échouer…
Mon exemple écrit avec les pieds souffre de dialoguite aiguë. De manière générale, les échanges manquent de naturel. La question sur Flamor le dragon posée par le nain est aussi lourde qu’inutile : il y a de fortes chances que le lecteur se fiche éperdument et du village, et de cette guerre lointaine. Et puis ce n’est pas logique : à ce stade du récit, comment le nain peut-il ignorer que son groupe est sur le point d’affronter un dragon ? Visiblement, ils sont venus pour ça. La réflexion de l’elfe est un gros clin d’oeil appuyé au lecteur pour rappeler que les personnages sont bien équipés et éviter un deus ex machina, mais du coup c’est tout aussi lourdingue. Et bien sûr, la tirade finale du nain censée amener de la tension prépare insidieusement le lecteur à l’idée que le dragon va s’échapper et menacer tout le royaume… Je ne parle même pas des incises :
répéta le nain
s’exclama l’elfe
bougonna le nain
Il y en a trop. Si on décide d’en mettre dans un texte, il faut éviter d’en placer plus de deux d’affilée. Après deux répliques, on peut alterner avec l’état d’esprit du protagoniste principal, ou bien décrire l’environnement, afin d’éviter un symptôme caractéristique de la dialoguite : le syndrome du décor vide. Les personnages sont tellement pris dans une discussion que l’auteur oublie de décrire le contexte autour d’eux, ce qui donne à la séquence une facture pièce de théâtre qui manque cruellement de vie. Quand des individus conversent, la terre ne s’arrête pas de tourner pour autant ! Au fond, l’univers est un personnage comme un autre, on en a un bel exemple avec le magnifique film d’animation les cinq légendes.
À un moment donné, Jack Frost, la Fée des dents, le lapin de Pâques, le père Noel et le marchand de sable discutent très sérieusement d’une stratégie pour sauver les rêves des enfants. À l’arrière plan, deux lutins susceptibles se disputent, avant de poursuivre leurs gags hors-champ, tandis que les personnages principaux continuent d’échanger des idées.
Par la suite, on ne voit plus les lutins à l’écran, mais on entend des bruits d’objet brisés à droite et à gauche de l’image, on imagine que cette dispute savoureuse prend des proportions épiques, on regrette même que l’écran ne soit pas plus grand ! C’est pour moi un moment merveilleux : arriver à faire croire au spectateur que l’univers qu’il découvre dépasse de loin ce qu’il voit. Si la magie opère au cinéma, alors que dire d’un roman SFFF* alimenté par l’imagination, l’essence même du show don’t tell ? Si un auteur n’arrive pas à entretenir l’illusion d’un univers vivant, et qu’il raconte une histoire plutôt qu’il ne la fait vivre, le contrat de confiance qu’il passe avec le lecteur est rompu.
J’ai peut-être l’air de mener un djihad contre le tell, mais malgré tous les efforts consentis, il y en aura toujours dans les livres, je pense notamment aux transitions du type « au bout d’une semaine de navigation, le voilier parvint à bon port ». Je suis d’accord sur le fait qu’on puisse insérer du tell à dose homéopathique, si besoin. Dans les pirates, je procède ainsi avec les extraits de l’Encyclopédie Royale, un livre imaginaire qu’on retrouve tout au long de la trilogie, en début de chapitre. Preuve en est avec les premières lignes de mon chapitre 7 :
Navire de ligne : les vaisseaux de la Marine royale se classent en fonction de leurs ponts et de leurs canons. Les navires de classe Squale ne comptent qu’un pont pour soixante-quatorze canons. Les classes Orca possèdent deux ponts pour quatre-vingts canons. Le Solennel, unique représentant de la classe Colossus, dispose de trois ponts de cent dix-huit canons et d’assez de puissance de feu pour envoyer par le fond n’importe quel navire.
Extrait de l’Encyclopédie Royale
Ici c’est un tell assumé (l’article encyclopédique est censé exister pour de bon), mais ce tell est court, il amène de la richesse à l’univers… et on ne le retrouve pas en plein milieu d’une bataille. Bien sûr, je suis loin d’être le seul à insérer du background au début d’un chapitre, Franck Herbert, Robin Hobb et Bernard Werber ne m’ont pas attendu pour procéder ainsi**.
En résumé, le show don’t tell est un continent si vaste qu’il faudrait plusieurs vies pour l’explorer. Pour des scènes dans lesquelles il y a de l’action, du suspens, ou de l’émotion, je pense que le tell est à proscrire, mais ce n’est que mon avis. D’autres auteurs auront une opinion différente, y compris sur Cocyclics : si vous écrivez de la SFFF*, je vous recommande d’aller faire un tour sur ce forum d’écriture qui a changé ma vie.
En guise de conclusion, puisqu’on parlait de Franck Herbert, je vous laisse avec un prologue extrêmement tell… mais que j’adore, celui du Dune de David Lynch.
* Science-Fiction Fantasy Fantastique
** Loin de moi l’idée de me comparer à ces illustres auteurs, hein !
A reblogué ceci sur Les Kroniques de Kalendir.
Le show est en effet absolument vital pour immerger le lecteur dans le récit. Sans, on de retrouve loin de l’émotion et des personnages, et ce n’est pas possible d’écrire un bon texte.
Et je pense que Le tell est vital, aussi. Siècle a publié un magnifique article il y a quelques semaines sur la routine, et la surprise.
Je me dis, et c’est mon interprétation, que la surprise n’est possible que si la routine existe. Le tell est identique.
Tout un texte en show sera épuisant je pense, ne laissant aucun moment au lecteur pour prendre du recul. Je ne suis pas convaincu de l’efficacité pour maintenir l’attention. Comme au cinéma, il faut des pauses, pour respirer.
Une alternance permet de mieux profiter des scènes prenantes et vitales, car elles ressortent d’autant plus.
Mais je te rejoins: dans l’absolu, on ressentira davantage un manque d’immersion, qui sera plus dommageable, que l’inverse. Il faut vraiment y prendre garde… mais pas non plus forcer la dose…
Honnêtement, je ne sais pas si on peut réellement lasser le lecteur en mettant trop d’immersion. J’ai toujours cette impression, qu’au fond, on ne va jamais assez loin en la matière, moi le premier. D’ailleurs, je ne suis jamais tombé sur un roman où je me suis dit « il y a trop de show don’t tell », je n’en peux plus ». A la limite peut-être avec une histoire horrifique de Graham Masterton… mais même dans ce cas, cela signifie que l’auteur a sacrément réussi son coup 🙂
Le « problème » que je vois avec la formule « show don’t tell » réside dans le côté dogmatique qui en ressort. C’est un outil puissant, j’en suis intimement convaincu, mais ce n’est pas quelque chose d’absolu.
Si on en revient à un autre art, le cinéma, je verrais le show comme un plan rapproché. C’est utile et ça immerge dans l’action. Mais ce n’est qu’un aspect de ce que l’on peut faire avec une caméra.
Je vais donner un exemple, pour être plus parlant.
Imagine un navire de pirates. Tu as un personnage qui découvre celui-ci et qui pose le pied sur le pont pour la première fois. Il te faut du show, bien sûr. Il vaut que le vent lui fasse plisser les yeux, que le soleil brûle sa peau, que les odeurs du larges, les chants des marins, et les descriptions de ceux-ci nous immergent.
Et lorsque le personnage vivra sa première bataille, il faut aussi montrer un maximum. C’est impressionnant, violent, et l’immersion passe par le show.
Mais, quand il monte sur le navire pour la dixième fois, deux ans après. Tu peux faire l’ellipse, mais s’il y a une discussion, tu ne peux pas escompter le même résultat si tu « montres ». Pire que cela, il pourrait générer un effet de répétition. J’irais même jusqu’à dire qu’avec un point de vue interne, tu ne retranscrirais pas bien la notion d’habitude du personnage (et du lecteur). Cela peut même clairement aller dans le ridicule, si après une bataille épique, tu mets autant d’emphase sur le campement, par exemple. Tu peux toujours montrer un ou deux détail, pour ancrer le personnage, mais la narration prendra plutôt un ton « raconter », et c’est normal.
Et c’est la même chose avec une ville. Martin ne décrit pas les palais de King’s Landing avec le même niveau de détail et de force à chaque fois, sinon le lecteur ferait une overdose. Il en aurait marre. Surtout que le show a tendance à rallonger le texte.
Par contre, il l’a fait au début.
Bref, mon point de vue n’est absolument pas qu’il faut remettre du tell. Juste qu’il faut user du show, qui est puissant, avec réflexion et ne pas le gaspiller sur l’insignifiant ou le moins important.
Coucou Dorian,
Merci d’avoir pris le temps de développer. Tu parles de beaucoup de choses, mais je pense qu’il ne faut pas confondre les descriptions et le show. Ce sont deux éléments qui peuvent se recouper, mais pas nécessairement. On peut mettre beaucoup de show quasiment sans descriptions ! Dans l’excellent Bird Box, les personnages sont aveugles… mais c’est d’autant plus effrayant car ils imaginent leur environnement.
Tu évoques le risque de répétition et de lassitude, qu’il faut bien entendu éviter, mais injecter du show ne signifie pas toujours être redondant, bien au contraire. Un exemple tout simple : l’Assassin Royal de Robin Hobb. Je n’ai lu que le premier cycle, mais du début à la fin tu es en point de vue interne. Pendant des années, tu restes avec le héros qui grandit quasiment dans la même ville, avec toujours les mêmes personnages… Et ça reste passionnant. Pourtant il y a clairement comme tu dis une « routine » qui s’instaure, mais on est dans l’histoire. L’ennui chez le lecteur, il vient surtout à cause d’un manque de conflit ou d’enjeu (je reviendrai là-dessus dans un futur article). Tu parles d’un exemple de cinéma avec le navire pirate qui peut devenir lassant, mais regarde un film comme The Revenant avec Di Caprio : on est en point de vue interne du début jusqu’à la fin, c’est haletant.
Pour ma part, je n’ai jamais abandonné un livre dans lequel il y avait « trop » de show, ça serait comme se plaindre qu’un bouquin soit trop immersif. Mais à l’inverse, j’ai souvent décroché à cause du tell.
Une fois encore, le Septième Guerrier Mage est pour moi un exemple en la matière. Du début jusqu’à la fin on est dans la tête du personnage, sans que le bouquin ne souffre du traditionnel ventre mou. A mon humble avis, on ne gaspille jamais le show, car comme je le disais plus haut, quoi qu’on fasse, il y aura toujours du tell dans une histoire, je le constate d’ailleurs avec mon premier roman, largement perfectible en la matière. Loin d’être un dogme, le show, c’est ce qui rend un récit vivant, magique, et qui fait oublier au lecteur qu’il est en train de lire un livre.
Mais bon ce n’est que mon avis 😉 Merci pour cet échange !
J’ai relu mon commentaire, et je pense qu’une partie est mal formulée.
je cite:
« J’irais même jusqu’à dire qu’avec un point de vue interne, tu ne retranscrirais pas bien la notion d’habitude du personnage (et du lecteur). »
J’entends par-là non pas que le pdv interne peut ennuyer (j’adore le pdv interne). Mais juste que « show » avec intensité quelque chose de routinier pour le personnage peut provoquer une différence de perception entre lui et le lecteur. Si le personnage est habitué, il remarquera moins ce qui autrefois lui paraissait extraordinaire. Et ce n’est pas du tout un souci pour moi, et pas non plus un facteur d’ennui chez le lecteur.
Je précise juste, car à la relecture, on aurait pu le lire comme une charge contre le point de vue interne, ce qui n’est nullement le cas.
Sinon, je viens de faire attention à cette phrase, dans ton article (je ne l’avais pas vu à première lecture )
« Pour des scènes dans lesquelles il y a de l’action, du suspens, ou de l’émotion, je pense que le tell est à proscrire, mais ce n’est que mon avis. »
Et oui, je te rejoins à 100%. Le cœur du livre doit se montrer je pense, et il apparaît pendant les moments de conflit (au sens large).
Un conflit en tell ne fonctionnera pas bien.
Discussion passionnante en tout cas ! Et je me fais un peu l’avocat du diable, non par esprit de contradiction, mais vraiment pour pousser ma propre compréhension du storytelling.
Tu as bien de te faire l’avocat de Satan 😄 C’est clair que c’est toujours intéressant d’échanger, cela ne peut que nous enrichir ! Un grand merci 😉
Hey, j’aime bien le commentaire de Dorian, moi ! 😉 (dixit la fille qui abuse un peu trop du tell dans ses romans).
En tout cas très chouettes articles sur le sujet ! Et j’aime beaucoup Gore le Barbare et le nain végétarien… Seront dans ton prochain roman ? :p
Coucou Nathalie, avant toute chose, je n’ai rien contre l’intervention intéressante de Dorian, un auteur que j’apprécie en plus 😉 Le souci que j’ai avec le tell, c’est que pour moi c’est de la facilité d’auteur, pour ne pas dire de la fainéantise. Je pense que 100% des écrivains sont capables d’écrire du tell, on le trouve d’ailleurs dans les contes façon « il était une fois ». En revanche, faire rire le lecteur ou le bouleverser, c’est autre chose. J’en ai eu encore la preuve aujourd’hui au cinéma avec le film « Lion », qui raconte l’histoire d’un petit Indien de 5 ans qui va se retrouver à 1200 kilomètres de chez lui, en plein Calcutta, livré à lui-même. La caméra est toujours fixée au niveau de sa taille, pour rendre le monde des adultes encore plus terrifiant… Que ce soit via un livre, un film ou un jeu vidéo, j’ai besoin d’être immergé dans l’histoire, c’est la condition première pour ressentir des émotions. Le tell pour moi, ça revient à dire « il était une fois l’histoire d’un enfant de cinq ans qui est séparé de sa mère ». Bien sûr, ça peut fonctionner, on va lire l’histoire… mais l’émotion sera toujours moins forte que si on découvre l’aventure par les yeux du gosse, qu’on sent son angoisse à l’idée de se retrouver dans un univers radicalement différent de son foyer rassurant… Il ne faut pas s’en faire pour le tell, car de toute façon il y en a toujours dans nos écrits, hélas… C’est bien ça le problème ! C’est pour ça que j’ai tant aimé le Septième Guerrier Mage de Paul Beorn, un vrai page turner qu’on a du mal à lâcher…
Merci pour Gore et son équipe, l’idée d’une publication est séduisante, mais je pense que le Donjon de Naheulbeuk a placé la barre trop haut pour moi 😀
Bises !
Perso, j’aime beaucoup la formule « show, tell or hide » : autrement dit, selon l’importance du sujet, on le montre, on le décrit, ou on le passe sous silence (ce qui est souvent une option oubliée).
C’est vrai que les ellipses, c’est bien aussi 🙂
Hey ! Je fais partie d’un forum d’écriture, où nous avons une section consacrée aux conseils d’auteur, est-ce que tu pourrais me permettre d’emprunter certains de tes textes pour les publier là bas (avec un lien vers ton blog, et crédité à la fin avec ton pseudonyme, évidement) ? Je pense que tes conseils sont vraiment très intéressants et pourrait aider bon nombre d’entre nous !
Voilà le forum en question : http://owo-project.forumactif.org/
Coucou Feu Follet ! Du moment que tu cites la source, tu peux même mettre mon vrai nom si ça te chante, il n’y a pas de soucis ! C’est vrai qu' »Escrocgriffe » est à la base mon pseudo, mais je n’ai rien à cacher, j’écris à plein temps sous mon vrai nom chez Bragelonne, je n’ai pas d’autre boulot. Je suis ravi si ces conseils te semblent pertinents. Pour info, désormais tous les articles sur l’écriture sont centralisés ici :
https://escroc-griffe.com/le-dojo-de-lecriture/
Sinon on peut les retrouver via la traditionnelle catégorie « Aide à l’écriture »…
N’hésitez pas à venir commenter, y compris si vous n’êtes pas d’accord, les échanges sont toujours enrichissants… y compris pour moi 😉
Bonne journée.
Hey !
Merci de ta réponse, je vais de ce pas faire partager tes articles auprès de ma communauté ! Encore merci de ton soutien !
Bonne journée.
Je t’en prie ! Juste pour info, je mettrai régulièrement à jour « le dojo de l’écriture » tout au long de l’année. Bonne soirée.
Je pense que je ferai des tours assez régulièrement de toute manière donc pas de soucis 😛 Bonne soirée à toi aussi !
A propos de la dialoguite: je vois passer beaucoup de romans qui ne semblent constitués que de scènes de dialogues, interminables, avec des personnages qui ne cessent de se balancer à la figure des évidences qu’ils ne devraient pas ignorer à ce stade de l’intrigue.
Il faut y voir, il me semble, une influence des séries télévisées: à trop en regarder, on en oublie que, contrairement à la télé, la littérature n’a aucune limite dans le genre de scènes qu’elle peut inclure, et qu’elle n’est pas du tout obligée de se cantonner à des successions de scènes avec des gens debout dans des pièces vides qui se balancent des insultes voilées.
Tout à fait ! Parfois j’appelle ça « le syndrome du décor vide », comme dans une pièce de théâtre moderne sans décor (même si je n’ai rien contre le théâtre moderne !). C’est un peu triste, pour ne pas dire sinistre…
Mais au moins, au théâtre, les comédiens le remplissent, cet espace vide!
[…] Bien sûr, si je réécrivais toute cette séquence aujourd’hui, elle serait probablement meilleure, un texte est toujours perfectible. Un roman est comparable à un sondage politique, il n’est qu’une photographie de votre façon d’écrire à un instant T, rien de plus. Tant qu’il n’est pas publié, on peut toujours aller plus loin dans l’immersion, c’est même un impératif absolu si l’on veut accrocher le lecteur et, à plus forte raison, l’éditeur. La bonne nouvelle, c’est qu’il existe plein de techniques simples pour corriger le tir. Je reviendrai là-dessus la semaine prochaine. […]
[…] il y a quelques années dans deux articles, Rendre un récit vivant et immersif partie 1 et partie 2. En fait, ce fameux show don’ tell n’est que la partie émergée d’un iceberg […]