De l’autre côté du mur

Et en plus la couverture est somptueuse !

Sibel a toujours dansé. Sa vie bascule le jour où elle touche involontairement l’une de ses soeurs, brisant ainsi son lien à l’Art. Bannie de sa communauté, elle découvre que les Mères cachent des secrets. Que se passe-t-il de l’autre côté du mur ?

Il y a des livres qui m’ont diverti. Il y en d’autres qui m’ont enthousiasmé. Mais peu m’ont touché comme De l’autre côté du mur.
« Émotion », c’est le premier mot qui me vient à l’esprit en refermant ce livre qui va très loin dans ce registre. Je me prends une sacrée claque tant Agnès Marot maîtrise son premier (!) roman : dès le début, on est complètement avec Sibel, en partie grâce à cette écriture à la première personne, particulièrement immersive. Dans un style simple et fluide, l’auteur nous entraîne dans un ballet des sentiments à travers un univers claustrophobique extrêmement pesant. Lorsque l’histoire commence, on ne sait absolument rien du monde extérieur, le dépaysement est si total qu’à de nombreuses reprises je me suis demandé si l’on était encore sur Terre tant il y a peu d’éléments auxquels ont peut se raccrocher (je regrette d’ailleurs que le quatrième de couverture en dise trop, je vous déconseille de le lire !). Les filles sont isolées dans cet étrange couvent hors du temps dédié à l’Art, un force mystique aussi subtile que puissante. Les personnages sont très attachants (mention spéciale à Aylin) et on a envie de connaître avec eux les secrets de cet univers.

Une dystopie intelligente

C’est difficile d’écrire un tel article sans gâcher de surprises, mais j’ai apprécié la gestion des révélations : à la différence d’Hugh Howey dans Silo, je trouve que l’auteur distille les informations sur l’extérieur sans en dire trop, tout en prenant soin de conserver le point de vue d’une adolescente. J’ai adoré la poésie qui se dégage de ce regard qui ne connait pas les smartphones ou Internet, élevé dans un cadre exclusivement féminin. Sibel me donne parfois l’impression d’être une extra-terrestre, du coup ses questions naïves n’en sont que plus touchantes : comment ne pas s’émouvoir lorsqu’elle rencontre une « panthère », ou bien lorsqu’elle découvre pour la première fois une peinture ? L’auteur est si doué dans les descriptions que j’ai instantanément reconnu le tableau en question.

Coup d’essai, coup de maître

Comme vous l’aurez deviné, il s’agit d’une (première) œuvre atypique qui fonctionne indépendamment de ses twists. Une œuvre qui interpelle sur l’Humanité : sommes-nous uniquement des êtres de raison et de passion, ou bien plus que cette simple addition ? Mais aussi une œuvre parfois cruelle avec la fameuse séquence du fouet, insupportable. Si le roman n’est pas exempt de (petits) défauts (je trouve la résolution finale du dernier tiers un peu trop vite expédié), il n’en demeure pas moins que j’ai adoré accompagner Sibel et ses amis. En tant qu’auteur, j’avoue avoir pris une belle leçon au niveau de l’émotion, j’ai savouré cette écriture viscérale, à mille lieux des dystopies commerciales ciblées « ados ». Si vous aimez voir des personnages prendre vie au fil des pages avec sincérité, alors lisez De l’autre côté du mur, vous ne serez pas déçus du voyage.

Published in: on novembre 28, 2013 at 9:35  Comments (4)  
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4 commentairesLaisser un commentaire

  1. Magnifique chronique Captain ! 😉

  2. Merci ! 😀

  3. tu le vends bien en tout cas ! 🙂 y’a rien de plus rageant que des 4ème de couverture qui spoilent, merci de prévenir !

  4. Merci ! Oui, je suis bien d’accord avec toi 😦


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